Chantal Fontvieille

Chantal Fontvieille est une artiste stéphanoise (1942-2025), diplômée des écoles des Beaux-Arts de Saint-Étienne et de Clermont-Ferrand (DNSEP, 1995) et de l’Université Jean Monnet de Saint-Étienne, où elle obtint en 1999 une Maîtrise d’Arts plastiques.

Son mémoire de maîtrise, sous la direction d’Éric Vandecasteele et de Jacquie Barral, portait sur la cible (« Impacts sur cibles : Du jeu balistique au jeu plastique », 1999, consultable BU Tréfilerie Magasin [MEM W 394]). À partir de 1993, elle concentra en effet sa recherche plastique sur ce thème, démultipliant ce motif en adaptant constamment ce support, qu’elle récupère le plus souvent sur des stands de tir. Elle crée alors des cibles monumentales comme ses stèles (Impacts de lumière sur stèles) ou des cibles plus intimes comme ses livres d’artistes (dont Simple Soldat, exposé en ce moment à la B.U.). Chantal Fontvieille adapte ainsi les formats de ses cibles à son médium, que ce soit la peinture, la gravure, la sculpture ou l’installation. Elle accueille dans son travail des formats naturels (ses arbres-cibles ou ses cibles-racines) ou s’inspire de personnages qui furent eux-mêmes des cibles (ses séries d’Ecce homo, de Saint-Sébastien ou de Sissi).

Dans son œuvre, la trajectoire des balles est à double tranchant : elle évoque autant la douleur du corps meurtri que la possibilité de réparation et de lumière que laissent les déchirures des cibles.  Car comme d’autres artistes contemporains (p. ex. Nikki de Saint-Phalle), Chantal Fontvieille fit de la cible un élément structurant, toujours sous tension. La cible est avant tout objet de mesure, au propre comme au figuré. S’épanouissant autour d’anneaux concentriques, c’est en soi un jeu d’échelles. Diversité des médiums, des matières et des motifs, jeu incessant de restructuration autour d’œuvres bicéphales, chaque installation de Chantal Fontvieille vient recadrer ses cibles en magnifiant leur centre qui en est l’origine vitale. Par le tir dont elle est l’objectif, la cible évoque aussi le geste le plus juste. C’est aussi celui de Chantal Fontvieille qui cherchait sans cesse les meilleures façons de transformer son motif pour mieux le magnifier. Dans l’œuvre de Chantal Fontvieille, le format de la cible industrielle s’impose mais la marque sensible du geste la transpose. Il y a ce constant dialogue entre l’objet-cible de départ et le geste artistique qui le transforme. Quel que fût le format choisi, il y avait toujours la blessure aléatoire du tir et son empreinte en négatif au verso, prétextes à une quête de formes de plus en plus sensibles qui se ramifia, dans ses dernières œuvres, jusqu’au rhizome.

Son œuvre a été exposée en France (Art Paris, Art Fair, Grand Palais ; Drawing Now, Carroussel du Louvre, etc.), comme à l’étranger (Biennale internationale d’estampes miniatures, Montréal, Panorama de la peinture française contemporaine, New York, etc.). Le Victoria and Albert Museum et la Tate Britain de Londres, conservent aussi deux de ses livres d’artiste. A Lyon, elle est représentée depuis 2003 par la Galerie Françoise Besson qui lui consacrera bientôt une huitième exposition personnelle.

Pour finir, il faut souligner l’attachement de Chantal Fontvieille au Département d’Arts plastiques de l’UJM et au Master édition d’art / livre d’artiste (EDLA) de la Faculté Arts, Lettres, Langues en particulier. Le travail de Chantal Fontvieille est représenté par quatre livres d’artistes dans la Collection de livres d’artistes Jacquie Barral que la Bibliothèque universitaire constitue avec l’aide du Master EDLA. Enthousiaste par rapport aux travaux des étudiants et envers la jeunesse, l’artiste venait régulièrement visiter les expositions annuelles de cette formation. Elle engageait souvent ses étudiants pour l’assister dans son travail, dans le cadre de stages de fin d’études. Son dynamisme artistique et son ouverture incomparable manqueront grandement aux étudiants et à l’équipe pédagogique du Master.

 

Anne Béchard-Léauté, mars 2025