Projet Lisamo
Un projet de l’axe « arts x science » financé par ANR 2023-2028 et porté par Lucien Derainne (UJM/CNRS/IHRIM).
On sait que la science a fréquemment fourni à l’art et à la littérature leurs sujets et qu’elle a modifié leurs techniques de représentation. Mais on a moins étudié la façon dont l’art et la littérature ont, en retour, influencé la science. Le projet LISAMO (financement ANR 2023-2028), porté par Lucien Derainne (chaire de professeur junior / IHRIM UMR 5317), vise à comprendre ce que les méthodes scientifiques, les savoir-faire expérimentaux et les valeurs qui guident les gestes des savants doivent aux romans, à la poésie et aux arts. Pourquoi les manuels scientifiques sur l’observation du XVIIIe siècle intègrent-il des chapitres sur la littérature ? Comment se fait-il que le Littré donne une définition avant tout esthétique de l’objectivité ? Qu’ont apporté les poèmes d’Ampère, les maximes de Sadi Carnot, les pièces de théâtre de Guyton de Morveau à leurs travaux scientifiques ? En essayant de répondre précisément à ces questions et en jetant des passerelles vers le monde contemporain et la science d’aujourd’hui, la chaire LISAMO vise à montrer que ce petit « x » qui relie les arts aux sciences dans l’axe de recherche de l’Institut ARTS (« arts x sciences ») ne peut pas être réduit à une flèche unidirectionnelle mais a bel et bien valeur de multiplication. Enfin, en interrogeant de manière transversale la question des savoir-faire, en science comme en arts, et de l’Encyclopédie à nos jours, ce projet contribue aux réflexions sur les « théories et pratiques du faire », engagées par l’Institut.
L’institut ARTS est membre du réseau TRAS Transversale des Réseaux Arts Sciences.
Art et Design pour repenser la recherche sur les plantes
Un projet Arts x Sciences porté par Florence Nicolè (UJM/LBVPAM), Nicolas Roesch (Collectif Zoepolis) et Isabelle Radkte (LAB01).
Présentation
Nous avons identifié un besoin crucial de comprendre la complexité du monde végétal. Nous proposons un workshop transdisciplinaire réunissant scientifiques, philosophes, designers et artistes pour explorer de nouvelles approches de recherche sur les plantes. Notre démarche vise à transcender l’anthropocentrisme et à créer des protocoles expérimentaux innovants pour mieux comprendre et étudier les plantes. En associant la philosophie pour le regard critique, l’art pour l’approche sensible, et le design pour la médiation, notre projet répond à la nécessité de repenser la relation entre l’homme et les plantes, tout en favorisant l’interdisciplinarité et l’innovation scientifique. Ce workshop aboutira à des rendus visuels, des textes et tout autre support permettant de rendre intelligible ces nouveaux protocoles d’étude. Le collectif Zoepolis s’emparera ensuite des résultats du workshop pour réaliser les supports d’une exposition ouverte au public, pour renforcer le lien sciences-société et donner de la visibilité à cette communauté art-science centrée plante.
Contenu et enjeux scientifiques
Notre projet de recherche transdisciplinaire vise à répondre à un défi scientifique majeur : la compréhension de la complexité des plantes, souvent sous-estimée en raison de leur apparente immobilité. Nous nous appuyons sur des recherches récentes qui ont démontrées que les plantes possèdent des capacités cognitives, de communication et de perception du monde qui les entoure. Cependant, ces découvertes ont du mal à être pleinement acceptées au sein de la communauté scientifique en raison de préjugés culturels et de l’absence de méthodologies adaptées. Or, nous pensons que les plantes, qui ont traversé 450 millions d’années chaotiques (pour comparaison, 300000 ans pour le plus ancien Homo sapiens), ont beaucoup à nous apprendre sur la résilience et l’adaptation aux variations climatiques. Mieux comprendre les végétaux nous aidera à faire face aux enjeux de la transition écologique. Nous faisons le postulat que pour appréhender leur altérité et leur complexité, il est nécessaire de les approcher avec une forme d’attachement et de sensibilité. Nous souhaitons donc transcender ces limites en créant un espace de réflexion transdisciplinaire.
Pour cela, nous organisons un workshop pluridisciplinaire entre scientifiques, philosophes, designers et artistes pour explorer et ouvrir de nouvelles manières de penser la recherche sur les plantes. Le but est d’aider les chercheurs à s’extraire de l’anthropocentrisme et à créer des protocoles expérimentaux innovants pour l’étude des plantes. Ce workshop se tiendra en juin 2024 sur le campus de la Faculté des Sciences et Techniques de l’Université de Saint-Étienne. Nous envisageons une cinquantaine de participants. Il s’ouvrira avec une conférence inspirante et une table ronde, avec des personnalités reconnues. Ces conférences seront ouvertes à un public plus large et accessible par visioconférence. Une première journée d’acculturation réunira des experts de divers domaines pour partager leurs perspectives sur le monde des plantes. Ensuite, les phases de problématisation et de décodage suivront avec des visites de laboratoires pour comprendre les méthodes scientifiques et des expériences artistiques seront proposées pour s’approprier la dimension sensible du sujet d’étude plante. Ces expériences ouvriront vers la phase d’imagination : des groupes travailleront sur des problématiques spécifiques, créant des dispositifs à prototyper. Enfin, dans la phase d’exploration, des artefacts, textes, dessins, gestes ou encore vidéos seront produits pour expérimenter les idées et les proposer au débat. Ce workshop sera clôturé par une présentation collective des projets développés et un regard critique sera apporté par l’expertise de grands témoins qui seront invités à participer et à observer tout au long du workshop.
Ce workshop vise à rassembler et structurer une communauté autour d’une préoccupation commune : redonner une place de choix aux plantes dans la recherche et dans nos socio-écosystèmes. Nous comptons sur la création d’un groupe pluridisciplinaire et engagé pour pérenniser les échanges et leur donner de l’ampleur.
Le collectif Zoepolis regroupe des artistes et designers autour du design centré non-humain. En amont du workshop, le collectif préparera des exemples inspirants pour la phase expérimentale. Il participera activement à l’animation puis à la suite du workshop, il finalisera les rendus sous des formes graphiques, audiovisuelles ou sculpturales pour produire une exposition ouverte au public.
Historique du projet
Ce projet est né de la collaboration entre Florence Nicolè, chercheuse en biologie végétale et écologie (LBVpam, UMR 5079, UJM), Fabien Labarthe, chercheur en sciences de l’information et de la communication (ELICO UR 4147, Telecom Saint Etienne) et le designer Nicolas Roesch, créateur du collectif Zoepolis, qui s’intéresse au design centré vivant (Life centric design). Ensemble, nous avons coordonné le Workshop EcoDesign, croisant écologie et design, impliquant deux masters et intégrant une méthodologie d’apprentissage active et collaborative pour la gestion de projet. Ce workshop annuel depuis 2016 soutient les actions de transition écologique des collectivités locales et de l’université, avec des expositions publiques pour impliquer la société. L’édition 2022, intitulée « People, Plant, Planet », explorait la transition écologique en intégrant les êtres vivants non humains et en s’inspirant des plantes pour repenser les organisations humaines. Elle a été exposée à la bibliothèque universitaire de la Métare en janvier et février 2023, ainsi qu’au Learning Center en mars et avril 2023.
Cette collaboration s’est vite élargie à plusieurs membres du collectif Zoepolis, designers ou artistes, très impliqués dans la recherche avec les plantes. Ensemble, nous avons élaboré cette proposition de workshop pour franchir une étape cruciale dans nos recherches sur les plantes, en rupture avec le paradigme actuel qui est imposé aux scientifiques. Elle sera aussi le catalyseur pour unir une communauté transdisciplinaire de professionnels qui partagent leur intérêt pour les plantes.
Objectifs du workshop
L’objectif principal de ce workshop, dédiés aux professionnels, est triple : d’une part, créer une communauté engagée, d’autre part, révéler de nouvelles méthodes pour étudier et comprendre les plantes, et finalement, produire des supports artistiques à partir de nos résultats pour toucher le grand public. À travers les événements publics qui jalonneront cet évènement (conférences d’expert, restitution finale des projets, exposition), la Fondation apparaitra comme le soutien d’une recherche interdisciplinaire novatrice mêlant sciences, art et design. Les effets attendus sont une meilleure compréhension des plantes et l’essor de nouvelles approches scientifiques qui pourraient générer des résultats inédits. Ces méthodes pourraient trouver résonance à une échelle internationale, plaçant l’UJM à l’avant-garde d’une recherche qui s’affranchit des barrières entre disciplines. Bien que le workshop soit destiné aux professionnels, nous prévoyons d’inviter les étudiants du département d’Arts Plastiques à participer au sein d’une équipe dédiée, chargée de produire des rendus et de documenter l’événement.
Ces rendus, ainsi que les résultats du workshop, ouvriront la voie à d’autres ateliers et méthodes pédagogiques novateurs dans le domaine de la formation transdisciplinaire, pouvant être déclinées dans des écoles de design nationale, voire internationale. Enfin, l’exposition prévue pour l’automne 2024 sera l’occasion de présenter les rendus (films, posters, objets, etc.) qui seront également documentés sur la plateforme en ligne mise en place par l’institut ARTS.
Pour aller plus loin
Siteweb du laboratoire LBVPAM
Siteweb du Collectif Zoepolis
Siteweb du LAB01
Pour prendre contact : Florence Nicolè
Ce projet bénéficie du soutien de :
Sillages
Du minéral au pigment : donner à lire les processus géologiques par le rapprochement d’approches expérimentales scientifiques et artistiques.
Un projet Arts x Sciences porté par Anne-Magali Seydoux-Guillaume (UJM/CNRS/LGL-TPE) et Etienne Pageault, artiste plasticien.
Anne-Magali Seydoux-Guillaume est minéralogiste et microscopiste, et s’intéresse aux transformations des minéraux en réponse à divers processus, long (échelle géologique) ou très rapides (femto-seconde), à l’échelle nanométrique. Elle s’intéresse également aux perturbations de l’enregistrement du temps mesuré dans ces mêmes minéraux. Elle aborde les problèmes via deux approches complémentaires que sont l’expérimentation en laboratoire et l’étude des systèmes naturels.
Étienne Pageault est artiste plasticien et danseur. Il travaille fréquemment en équipe avec des partenaires des domaines scientifiques et/ou techniques, abordant les arts visuels et la performance comme des territoires propices à la réunion de modes de pensées, de temporalités et de de représentation complémentaire.
Comment donner à vivre les processus géologiques se déroulant sur des échelles de temps et d’espace échappant à la perception humaine ? Anne-Magali transforme puis étudie à l’échelle nanométrique des lames de roche extra minces pour rejouer en laboratoire des perturbations intenses du passé et interpréter les mouvements antérieurs de la matière. Etienne rejoue les mouvements lents du monde dans des performances graphiques et scéniques, pour s’approcher en acte des logiques mouvantes de la matière. Nous souhaitons faire converger ces approches scientifiques et artistiques dans des recherches et performances co-construites, afin de mettre en mouvement les paysages figés de la géologie, et les représentations trop cloisonnées des mondes scientifiques et artistiques. Par un renouveau des imaginaires de la science, une mise en lumières des ressources humaines, géologiques et technologiques locales, nous souhaitons participer à l’attractivité de notre territoire et de nos filières.
Sous la surface : la science et l’art.
“Si la réalité venait frapper directement nos sens et notre conscience, si nous pouvions entrer en communication immédiate avec les choses et avec nous-mêmes, je crois bien que l’art serait inutile, ou plutôt que nous serions tous artistes, car notre âme vibrerait alors continuellement à l’unisson de la nature.” [H. Bergson, Le Rire, 1900.]
Les sciences naturelles et l’art partagent parfois le désir commun d’appréhender la réalité au-delà des apparences et des temporalités du quotidien. Lors de notre rencontre, nous avons été saisi.e.s de constater à quel point nos recherches sur le temps et la matière convergent, dans leur objet comme dans leur méthode expérimentale.
Par la réalisation de tranches de roches extra fines (< 100 nm) et en ayant recours à l’imagerie à haute résolution par microscopique électronique en transmission (MET), Anne-Magali Seydoux-Guillaume s’intéresse en effet aux transformations en réponse à des processus divers (déformation, radioactivité, altération…) et à l’enregistrement du temps dans les minéraux. Elle procède notamment à la reproduction en laboratoire des conditions extrêmes ayant perturbé la structure atomique des roches (impacts d’astéroïdes ; Figure 1) à l’aide de lasers.
Figure 1 : Les effets d’un impact d’astéroïde tombé il y a 2 Milliards d’années en Afrique du Sud (Vredefort) visualisés à des échelles différentes : sur le terrain à gauche (le marteau donne l’échelle) et en laboratoire dans un minéral choqué, observé au MET à l’échelle nanométrique (à droite). A gauche les zones sombres correspondent aux veines de choc produites lors de l’impact. A droite on visualise les effets de ce choc intense sur l’organisation de la matière à l’échelle nanométrique ; dans la partie basse de l’image les atomes (points blancs) sont parfaitement ordonnés alors que tout est désordonné dans la partie haute.
De son côté, Étienne Pageault travaille les flux et la structuration de la matière au moyen de charges minérales (sels, sables, poudres et pigments) mises en mouvement à l’aide d’instruments à air (souffleurs, compresseurs) et à eau (trempage, fluage). Il reproduit dans une démarche comparable les conditions environnementales menant au dessin des roches et des paysages (dépôts, érosions, alluvions, agglomérats…), abordant ainsi également la question du temps et du mouvement cristallisé dans les formes minérales (Figure 2).
Figure 2 : Étienne Pageault au travail (à gauche) et détail d’une des productions graphiques (à droite)
Travailler les imaginaires
Dans la poursuite du projet engagé avec l’Institut Rhônalpin des systèmes complexes (IXXI) depuis 2023, nous souhaitons associer nos approches expérimentales scientifiques et artistiques pour traiter de ces questions au travers de recherches et performances co-construites, à destination de publics variés. Nous souhaitons travailler à partir de la matière scientifique (données, représentations, imagerie microscopique, échantillons de terrain, lames et poussières de roches, collections minéralogiques locales…) en la combinant à une pensée du mouvement dans des dispositifs optiques, graphiques et performatifs. Nous souhaitons par ce biais faire évoluer l’imaginaire associé aux sciences géologiques dans une mise en scène de ses contenus sensibles, un renouveau de ses représentations et une mise en lumière de ses acteur.ices. Cela permettra, entre autres, de toucher des publics différents de ceux atteints habituellement par la vulgarisation scientifique classique, en accédant au savoir par le domaine du sensible et de l’émotion (littéralement : mise en mouvement).
Nous visons à produire des dispositifs autonomes, et/ou activés par une série de performances (incluant le/la chercheur.euse comme acteur.ice). Les formes envisagées pour la recherche s’incarnent dans différents supports et outils expérimentaux, réunis par leur potentiel cinétique : projection optique de lames minces de laboratoire, soufflage de résidus de polissage de roches (performance et/ou captation vidéo), impression et/ou sérigraphie d’imagerie électronique sur soie, travail de tissage extrait des structures atomiques des échantillons, animation stop-motion et travail de captation / retranscription sonore. Les ressources du laboratoire de géologie, les collections de l’École des Mines ainsi que les enquêtes de terrain (crassiers, bois d’Avaize et autres paysages post industriel) serviront de terreau à cette exploration, pour valoriser à moyen et long terme la spécificité géologique et industrielle du bassin stéphanois.
Conservant cette vocation trans-disciplinaire, nous souhaitons nous produire dans des espaces et événements dédiés à la science comme à l’art (voir agenda), ainsi que dans des contextes en marge de la médiation culturelle classique (écoles, amicales, maisons de quartier) en ajustant les dispositifs aux contraintes de ces espaces. Nous envisageons également d’exporter (et/ou de produire) une partie de ces installations à Katowice, ville polonaise au passé industriel faisant écho au bassin Stéphanois, qui sera capitale Européenne de la Science en 2024 et avec qui l’université est déjà partenaire (jumelage du programme “Transform4Europe”).
Valoriser les ressources territoriales
Nous souhaitons que ce projet favorise plus généralement la réunion d’acteur.ices du monde de la recherche scientifique et artistique, du patrimoine et de la valorisation du territoire autour de la spécificité géologique et historique de Saint-Étienne.
Pour aller plus loin
Consulter la vidéo « Quand un astéroïde rencontre un minéral : plongée fantastique dans la matière ! » produite par l’Université Jean Monnet :
Actualités du projet
– Métasomatose : performance programmée dans le cadre de la Fête de la Comète de Saint-Étienne, le 19/11/2023, réalisée par Brahim Lumière et Étienne Pageault.
Un projet qui bénéficie du soutien de :